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Les yeux entrouverts, je jette un coup d’oeil à mon collègue assis à côté de moi. Il affichait un air troublé, alors que l’homme marchant dans la pièce s’était arrêté debout devant lui, une expression pénétrante sur le visage.
Mon collègue joint ses mains devant lui, tout en s’inclinant profondément. Et sans attendre, l’homme lui assène un coup de latte retentissant sur le dos.
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ce moment-là: “Mince, à mon tour maintenant...”.
Revenons un peu en arrière...
Par une chaude journée d’automne, nous nous mettons en route pour le temple Erinji situé dans la ville de Koshu, à une demi-heure environ de Kofu. La nature autour du temple est absolument magnifique, surtout parée des tons flamboyants de l’automne. Les feuilles dorées des arbres gingko sont d’ailleurs si abondantes que j’en oublie presque qu’il s’agit d’une espèce en danger.
Nous nous dirigeons vers l’entrée du temple principal, où nous attend le moine Kaneko, notre guide pour la journée. Je ne saurais dire ce qui m’a le plus surprise: son accent américain impressionnant ou le fait que son prénom soit Soy (comme la sauce!). En tout cas, son accueil chaleureux et ses plaisanteries nous ont tout de suite mis à l’aise et convaincus que nous allions passer un bon moment.
Sans tarder, nous nous rendons dans une pièce à tatami avec un autel au centre, dont les portes coulissantes offrent une vue sur le jardin traditionnel. Juste assez de coussins sont disposés pour notre groupe composé de sept personnes, plus M. Soy.
“Récemment, le concept de méditation a gagné en popularité aux Etats-Unis et de manière générale à l’étranger. Ainsi, nous avons reçu de nombreux visiteurs qui souhaitent expérimenter le même concept. Cependant, la méditation et le Zazen sont légèrement différents."
"La méditation, c’est acquérir quelque chose. Le Zazen, c’est lâcher prise sur les choses.”
Afin d’illustrer plus concrètèment ses paroles, le moine nous demande d’imaginer un verre rempli d’eau. Imaginez ensuite ce qui se passe si l’on remplit le verre au-delà; que se passerait-il?
Un des membres de notre groupe répond alors de manière presque poétique: “Le verre déborderait, ce qui rendrait tout apprentissage futur impossible. Le Zen en Chair et en Os. 1957. Je pense que nous avons lu le même livre.
- Page 112?
- 113.”
Nous avons tous ri.
M. Soy nous explique ensuite que pour les moines zen, se vider l’esprit est très important car cela permet d’intégrer une nouvelle sagesse et de nouvelles connaissances. Il nous invite donc à faire de même.
Notre première tentative se résume aux instructions suivantes: faire attention à notre posture et inspirer par le nez. Notre seul et unique objectif consiste à rester assis sans bouger, et vider complètement notre esprit. Essayer de se débarrasser de toute pensée superflue, ou plutôt arrêter de penser tout court. Et ainsi, atteindre l’illumination.
Facile me direz-vous?
Loin de là.
Cette première expérience touche à sa fin lorsque M. Soy frappe deux lattes en bois l’une contre l’autre et fait retentir le son clair d’une cloche. Il nous demande alors comment notre tentative s’est déroulée.
“Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à ce que je voudrais manger au déjeuner”, dit l’un des membres de notre groupe.
“Pendant une seconde, je n’ai pensé à rien. Puis j’ai réalisé que j’étais en train de penser “ça y est, j’y suis arrivé!” et je me suis retrouvé à penser”.
Pour ma part, la première chose à laquelle j’ai pensé est “Je pense, donc je suis”, et je me suis alors demandé s’il était même possible de ne penser à rien du tout, avant de me surprendre à chanter dans ma tête à cause du silence pesant.
Il est clair que nous avons tous eu la même expérience. Pas étonnant qu’il faille des années pour atteindre l’illumination...
Après nous avoir conseillé de ne pas prendre trop à coeur les échecs de notre premier essai, Mr. Soy nous donne quelques astuces pour le round suivant.
La clé, dit-il, est de compter votre nombre de respirations.
Inspirer, un... expirer.
Inspirer, deux... expirer.
Inspirer, trois... expirer.
Et répéter l’opération autant de fois que vous le pouvez. Si vous commencer à penser, vous devez recommencer depuis le début. Le fait de compter est censé vous aider à rester concentré sur une chose et ne pas vous laisser distraire par d’autres pensées.
Cependant, un autre élément est venu se rajouter.
Au lieu de méditer avec nous, M. Soy va cette fois-ci marcher dans la pièce en tenant un long bâton appelé Keisaku. Si vous avez l’impression que vous vous êtes laissés distraire par des pensées parasites, vous devez joindre les paumes de vos mains lorsqu’il passe devan vous. Ce faisant, M. Soy s’inclinera à son tour et utilisera le keisaku pour vous frapper le dos (sans vous faire mal!), ce qui vous mettra dans de meilleures dispositions pour poursuivre votre méditation.
Nous n’avons pas eu besoin d’attendre longtemps pour qu’un des membres de notre groupe reçoive son premier coup de bâton.
Alors que j’ai réussi à compter jusqu’à 60 sans me laisser distraire par de quelconques pensées, le son de mon voisin en train de se faire frapper par une latte en bois interrompt mon moment de quiétude, et je ne peux m’empêcher de penser: “Mince, à mon tour maintenant...”
Mais alors que j’ouvre les yeux avec hésitation (le zazen peut être pratiqué les yeux à demi ou complètement fermés) il est déjà en train de passer son chemin, me laissant tout le loisir de recommencer à compter, et ce sans douleur.
Bilan: j’ai réussi à compter jusqu’à 60 sans interruption, sur une session de 10 minutes. J’étais assez fière de moi, bien que je sois la seule à n’avoir reçu aucun coup de bâton. Cependant, le maître zen M. Furukawa qui nous rejoint à la fin ne tarde pas à faire éclater ma bulle.
“A chaque fois, nous avons des visiteurs qui disent fièrement: “J’ai réussi à compter tout du long sans m’arrêter!”. Bien sûr, je les félicite, mais en même temps, ces personnes-là n’ont pas vraiment atteint l’illumination. Après tout si vous continuez de penser aux nombres, on ne peut pas dire que votre esprit soit complètement vide”.
J’ai donc dit adieu à ce court instant d’auto-satisfaction. J’avais clairement encore beaucoup à apprendre...
Je vous recommande fortement de vous essayer au Zazen au temple Erinji. Entre la gentillesse de MM. Soy et Furukawa, la nature environnante, l’occasion de réellement vous vider l’esprit et de chercher la paix intérieure, et la splendide architecture du bâtiment, Erinji a beaucoup de choses à vous offrir. Par ailleurs, pour les amateurs d’histoire, le temple est célèbre car il abrite la tombe d’un certain seigneur Shingen Takeda, qui avait pour habitude de se promener dans les environs...
En voiture: Chuo Expressway, Katsunuma IC
En transports en commun: prendre la ligne JR Chuo et vous arrêter à la station Enzan. Prendre la sortie sud, et monter dans un bus direction Nishizawa-keikoku. Descendre à l’arrêt Enrinji-mae.
Article traduit depuis la version en anglais de ce site.
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